Je remercie vivement @Nicolas Boutié, rédacteur en chef du journal protestant régional en Région Cévennes Languedoc Roussillon, le Cep, pour l’accord de publication sur mon blog.

Je ne savais pas encore que cet entretien d’embauche de l’année 1987 serait aussi déterminant pour ma feuille de paye que pour les rencontres, lectures, réflexions de toutes les années qui ont suivi. La fonction professionnelle que j’occuperai était un poste central pour rencontrer des personnes qui prenaient Dieu au sérieux – je cite ainsi l’un des pasteurs de l’Église protestante unie de Montpellier qui a prêché le vendredi 24 décembre 2021 au temple de Maguelone– et en font la mesure de leur vie. Je suis arrivée sans préjugé ni jugement pour la fonction, ignorante de ce qui animait ce lieu, mais forte de mes compétences professionnelles acquises et convaincue que je pouvais les mettre à profit. On devrait toujours être attentif à ses mouvements intérieurs, aux rires et à la joie qui traversent les échanges, à cette sensation d’être à sa place, aux connivences des regards et à la sonorité juste des paroles. Et cela n’est peut-être pas si fréquent dans nos vies de ressentir ce fil de laine soyeuse et douce tissé entre notre intériorité et notre environnement. Je ne savais pas ce qui se jouait en 1987 mais en 2022 je sais que c’était un embarquement pour la traversée d’un cap. C’est l’après qui détermine la force de l’événement et lui en donne le sens. Et puis dans cette bibliothèque de la Faculté de théologie protestante de Paris, ce sont les feuillets roses ou jaunes agrafés et centrés dans la revue Évangile et liberté, qui m’ont appris que la religion n’est pas soumission, mais liberté spirituelle ; que penser ne s’oppose pas à croire, que la réflexion sur la foi enrichit la connaissance de nous-même et notre relation aux autres et qu’il est possible de concilier désir spirituel avec notre condition humaine du 21ème siècle. Depuis 1886 ce journal garde sa pertinence et le Mouvement libéral du protestantisme me semble toujours le seul appui théologique pour argumenter face à la montée du cléricalisme, à la radicalité théologique et  à la violence de revendication d’un Dieu qui n’appartient à personne et surtout pas à ceux qui croient le défendre en tuant, en menaçant et en excluant (Pierre-Olivier Léchot, novembre 2020, en réaction au meurtre de Samuel Paty). Tenir ensemble la raison, la foi et la liberté de penser  nous conduit à ne pas laisser un homme, une femme d’Eglise dans sa toute puissance illusoire, à les considérer comme des êtres critiquables et contestables et nous donne le courage de confronter à notre ici et maintenant les choix d’ordre spirituel. Le 83 boulevard Arago (Paris, 14ème) en cette fin des années 80 a encore pour moi la force d’une figure spirituelle.

Ce fil nourricier et confus
Bientôt rompu
Pour qu’enfin soit le Je
Face aux multiples Tu
Reliés en une laine soyeuse et douce.

Categories:

Comments are closed