Lucas Bielli, psychanalyste à Montpellier et Guylène Dubois, psychanalyste à Sète animent la chronique hebdomadaire Radio divan, pour une psychanalyse populaire. Deux voix pour explorer un sujet psy.

Pour écouter l’émission sur FM-PLUS. Et sur Youtube.

Factory takes his hearing, factory gives him life, L’usine lui prend son audition, l’usine lui donne la vie The working, the working, just the working life. Le travail, le travail, juste une vie de travail. Bruce Springsteen, Factory..

Alors, qu’est-ce qui se dit là ? 

Le contexte

Factory est une chanson de Bruce Springsteen, chanteur, auteur compositeur américain né en 1949 dans le New Jersey, Surnommé le boss, en raison de sa popularité immense. Factory sort en 1978 dans l’album Darkness on the edge of town. Le chanteur évoque les difficiles conditions de travail de son père. ​​C’est juste le travail, le travail, une vie de  travail. A travers les manoirs de la peur, à travers les manoirs de la souffrance, Je vois mon père qui traverse les portes de cette usine sous la pluie.

Interpréter la citation

Quand on parle de travail en psychanalyse, nous sommes loin du travail bruyant vécu en usine, dans des conditions qui provoquent l’humanité. Le travail en analyse peut parfois durer une vie entière et prendre différentes formes. Le travail analytique peut commencer en face à face avec un psychanalyste, puis continuer sur le divan. Il peut s’arrêter avec un premier thérapeute, puis reprendre avec un autre thérapeute. On parle alors de tranches d’analyse qui se succèdent sur le parcours de vie. Une cure analytique peut aussi s’arrêter définitivement. Mais ce qui probablement ne s’arrête jamais c’est une façon de penser, cette façon de continuer à travailler mentalement sur soi-même. Cette façon de se questionner et même si la cure analytique cesse, reprend, s’arrête définitivement, cette méthode d’investigation est toujours présente. 

Le travail analytique a son lot de souffrances. Ce sont parfois ces souffrances qui empêchent la personne analysée de continuer. Pour éviter de revivre ses souffrances dans l’espace analytique, dans le cadre proposé par le thérapeute, le patient est tenté et parfois fin de son propre chef au travail entrepris. 

L’analyse est aussi un travail qui demande une constance dans la répétition. C’est un labeur au minimum hebdomadaire, mené sans relâche. Et c’est dans la répétition des souvenirs, des mots, des phrases, des récits que peu à peu le travail se fait et s’accomplit. L’impression d’avoir déjà dit et redit autorise de redire encore, de relater encore les mêmes histoires jusqu’à ce que ces histoires, notre histoire ne soient plus un déclencheur de peurs, de pleurs. C’est dans la répétition que se fait le travail analytique. Dans les gestes de routine, que ce soient ceux du cabinet de l’analyste, les gestes d’accueil, l’installation dans l’espace. Et puis, souvent la même histoire reprise, ré-énoncée jusqu’à qu’elle se dévoile épurée de ses mystères et de ses émotions passées. 

Conclusion

Oui, entreprendre une analyse est un travail. Plus ou moins long, plus ou moins fastidieux. Mais ce travail donne une nouvelle naissance. Une vie nouvelle peut se construire, enrichie de l’ancienne. Une vie nouvelle, lucide et autonome. 

Guylène Dubois