Fais pas ci fais pas ça / Jacques Dutronc

Cette chanson Fais pas ci, fais pas ça de l’auteur-compositeur-interprète Jacques Dutronc, écrite par Jacques Lanzmann et Anne Segalen est enregistrée en 1968. Jacques Dutronc a 25 ans et est alors au sommet de sa gloire. 

Fais pas ci fais pas ça, c’est une chanson qui évoque  l’enfance et les remontrances parentales banales. Une chanson pour nous  faire  réfléchir au lien entre chanson et psychanalyse. 

Que signifie qu’un air vous poursuive, qu’il revienne encore et encore vous hanter, jusqu’à devenir obsédant ? Ou, pour parler plus simplement et en termes généraux : quelle est la signification d’une mélodie surgissant au sein de pensées d’un tout autre genre, se questionne en 1953 Theodor Reik, ce psychanalyste austro-hongrois mort en 1967. 

Être attentif à la chanson qui nous obsède est un moyen de repérer l’inconscient et sa manifestation. Par quelques paroles d’une chanson, ou par son refrain que nous fredonnons, c’est une immersion dans une partie de notre inconscient qui s’offre à nous. Cette chanson qui trotte dans la tête et qui surgit inopinément est du même ressort que le rêve, le mot d’esprit, le lapsus, l’acte manqué. Toutes ces formations ont en commun de venir du même lieu que S. Freud a découvert, l’inconscient. Grâce à ces formations, ces brèches dans notre réalité, l’inconscient émerge et se rend en quelque sorte visible. »

Les paroles de cette chanson qui nous trottent dans la tête, sont celles dont on prend conscience petit à petit. Quelquefois le matin en se levant, en se promenant, en voiture, sous la douche et souvent dans des situations propices à la  rêverie. Les paroles, l’air, la musique surgissent, inattendues. Ces surgissements de parole et de mélodie ne sont pas le fruit du hasard. Cette musique de fond qui accompagne nos pensées conscientes n’est jamais fortuite. Une musique de fond, qui devient une musique obsédante, imposante.  Considérer le moment où la chanson arrive à soi, considérer les émotions que la musique provoque, l’imaginaire que ce processus chanté produit donne des indices précieux sur notre vie psychique. S. Freud parle de la première inscription des perceptions dans la vie psychique, cette inscription est « tout à fait incapable de conscience, disposée selon les associations par simultanéité ». Ainsi, dans ce cadre, on peut évoquer les berceuses chantées au bébé depuis la naissance et ainsi nous propulser dans le magma émotionnel de nos premiers jours, mois, années de notre vie. Et puis, la langue des mots a une musique, et c’est cette musique des mots et des paroles que le bébé perçoit bien avant le sens des mots. 

Ces lambeaux de musique apportent du sens à l’exploration de notre psychisme et sont loin d’être à négliger. Ils peuvent, en associant les idées, en décrivant les images que cette musique suggère ou impose, faire accéder l’analysant à son inconscient. A cette partie de lui-même qui n’ouvre pas si facilement ses portes d’accès. Cette porte de la musique, de la chanson peut s’ouvrir avec son analyste. Mais elle peut aussi s’ouvrir en auto-analyse,  par le biais d’une écriture personnelle, dans son propre journal, en laissant le stylo ou les doigts sur le clavier guider son inspiration et son écriture. Le geste de l’écriture devient alors introspection, chercheur de sens et résurgence de souvenirs enfouis. 

L’inconscient tisse en un maillage serré notre mémoire de tous les instants et quand la musique les accompagne, c’est elle qui nous fait entrer dans la danse de notre inconscient.

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